Hypotypose

Ce mot, rendu un peu balourd par sa consonance avec hippopotame, est pourtant une figure de style majeure, au plus près de la question de l’imaginaire qui sert aujourd’hui de fil conducteur à mes projets…

L’hypotypose est une description qui a pour but de saisir son lecteur par un effet d’évidence. On est plongé dans la réalité décrite sans plus aucune distance narrative. L’auteur disparaît. On ne lit plus : on vit, on éprouve !

Racine est souvent cité pour avoir produit les plus belles hypotyposes et c’est naturellement dans sa biographie, romancée par Nathalie Azoulai – Titus n’aimait pas Bérénice – que j’ai découvert le mot. Avec une nouvelle occurrence quelques jours plus tard dans un documentaire consacré à Macron à propos de son discours à l’enterrement de Johnny Halliday !

Le mot me poursuit, j’en cherche donc l’actualité dans une époque où l’image triomphe. Ce n’est sans doute pas un hasard si notre temps, où tout est montré sans filtre, est à ce point en panne d’un imaginaire permettant de se figurer l’avenir… Tout voir nous sature d’images et nous empêche de voir au-delà de l’immédiatement accessible. La force du récit écrit ou oral c’est qu’il nous pousse à voir, sans rien sous les yeux. A l’heure des capteurs d’images rendus omniprésents par nos portables, il est sans doute temps de retrouver la force incroyable des hypotyposes pour réactiver nos imaginaires. Vive les mots!

 

Humain, humus, humilité

Des mots reliés, mais un lien qu’on a oublié, qu’on cherche parfois à nier, qu’on devrait pourtant cultiver…

Nous ne sommes pas assez attentifs aux parentés des mots. Vous l’avez déjà compris (ou le savez), humain, humus et humilité ont la même étymologie, la terre au sens de sol. L’humilité, c’est en réalité assez simplement se reconnaître terrestre, partie prenante du vivant.

Ça doit être absolument insupportable aux transhumanistes qui veulent de toute urgence nous sortir de cette matérialité… humiliante. Pour eux l’humain (au moins son intelligence, la seule chose qui compte pour eux) pourrait être transféré sur des « supports » différents que ces corps issus de la glèbe. Moi qu’on qualifiait jeune de « pur esprit » et qui m’en trouvais bêtement flatté, je comprends aujourd’hui viscéralement à quel point j’étais sèchement désincarné.

Patrick Viveret ajoute à ce triptyque l’humour mais c’est en fait une autre origine : de la terre on passe à l’eau à travers l’humeur, les humeurs, l’humidité. C’est le fluide, le liquide, une certaine ambiguïté aussi, qu’on doit interpréter. Restons-en donc au triptyque. Humain, humus, humilité. Si on y réfléchit, c’est le contour, l’horizon du développement durable, l’antidote à l’hubris.

Sur le même sujet, plus centré sur la dimension (essentielle !) de l’agroécologie un beau papier de la romancière Sylvie Germain

 

 

A l’aventure !

Après deux mois de silence et de doute…

Je suis à nouveau parti à l’aventure ! j’avais évoqué en décembre mon désir de retrouver le chemin de l’engagement citoyen mais en fait, en janvier, c’est la panne qui est arrivée. Plus une envie, seulement des angoisses et une fatigue pesante, incapacitante. Le médecin a dit « épuisement professionnel ». Je parlerais de vacance, au singulier et au sens propre. Le vide, littéralement. Janvier est passé… mais pas pour moi. Je peux dire que je ne l’ai pas vécu. Février est bien avancé et je reprends progressivement mes esprits. L’énergie revient. L’Italie, comme toujours a contribué ces derniers jours à me revitaliser. Trois jours sur la riviera italienne, cette côte ligure dont j’aime les contrastes : mer et montagne, palmiers et pins, villas offertes aux regards et villages escarpés et secrets.

Après mon faux-départ de janvier, me voilà au début d’une nouvelle aventure. Je quitte Deloitte mais pour poursuivre le même projet par des voies moins balisées. J’ai besoin de cette part d’inconfort pour être confortable (au grand dam de ma chère et tendre qui aimerait davantage de stabilité). L’incertitude me fait avancer.

J’ai utilisé le terme d’aventure spontanément, sans trop y réfléchir, dans le mot que j’ai envoyé aux équipes de Deloitte pour expliquer mon départ. Une de celles avec qui j’ai eu l’occasion de travailler a pointé le mot et est revenu à l’étymologie comme je le fais souvent dans ce blog. J’y reviens à mon tour. L’aventure, c’est ce qui va advenir (advenire et son participe futur adventurum), partir à l’aventure c’est donc se tourner vers l’avenir, en se libérant du passé sans doute mais aussi de l’éternel présent qui caractérise notre époque. L’à-venir peut n’être qu’un simple futur bientôt avalé par le présent s’il n’est pas regardé comme une matière à récit, comme je l’évoquais dans mon dernier texte de 2017.

J’ai rompu les amarres mais pas les relations. Je ne sais pas encore où ma navigation va me mener mais je suis sûr d’une chose : les liens tissés depuis vingt ans avec Didier Livio et l’équipe de Synergence et depuis deux ans au sein de Deloitte vont perdurer. Mieux même, j’ai la certitude qu’ils vont « être de l’aventure » car nous sommes mus par les mêmes ressorts. 

Les Ateliers de la citoyenneté ont été une première aventure hors des chemins balisés. Celle qui s’amorce n’a pas encore de destination mais elle a déjà un cap : raconter un avenir désirable pour lui permettre d’advenir. Une aventure au sens premier du terme. Ce blog sera bien sûr un moyen de la raconter. Comme le disait Sartre dans la Nausée (citation trouvée dans le dictionnaire culturel de la langue française d’Alain Rey) :

[…] pour que l’événement le plus banal devienne une aventure, il faut et il suffit qu’on se mette à le raconter.

 

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