Lettre ouverte à Thomas, Jean-Michel, Laurent, Christophe, Dominique, Alain…

Peut-on dire que la démocratie est en danger et ne pas informer sur les solutions qui s’inventent ? une lettre ouverte entre coup de gueule et invitation !

Messieurs les commentateurs de la vie politique,

Les élections européennes approchent et vous avez sans doute déjà en tête les formules choc dont vous fustigerez les Français  au lendemain de l’intronisation du parti de Marine Le Pen comme première force politique française. Cet événement non encore advenu, vous l’avez pourtant déjà amplement commenté avec toute la vertu républicaine qui convient… mais aussi – en tout cas nous ne pouvions nous empêcher de l’entendre entre les mots prononcés – une Schadenfreude comme disent les Allemands, cette joie mauvaise de tout spectateur de catastrophe.

Je ne conteste ni la réalité du risque, ni le droit à s’en indigner. Au contraire. En revanche je trouve terriblement dangereux que cela ne vous conduise pas à exercer le principe qui s’impose pourtant à chacun : l’assistance à personne en danger ! Votre responsabilité peut-elle se limiter à prévenir du risque à la manière de Cassandre alors que votre métier est avant tout d’informer, de donner à voir les options qui s’ouvrent au choix des citoyens ?

Pouvez-vous vous contenter de dire à longueur d’éditorial que la démocratie fonctionne mal et passer sous silence toutes les tentatives faites pour la repenser en profondeur ? L’étude de Viavoice sur les « solutions pour la démocratie de demain » a fait l’objet d’une excellente interview par Bruno Duvic mais a été réduite à rien dans Le Monde pourtant commanditaire !

De nombreux ouvrages ont ouvert des pistes intéressantes pour penser autrement la question démocratique (Je pense notamment au livre de Gérard Mermet dont j’ai été surpris de voir si peu de reprises). Quel écho leur avez-vous donné ? De multiples initiatives sont prises qui montrent une appétence pour l’invention démocratique. N’y avez-vous pas accès ? Vous paraissent-elles insignifiantes, anecdotiques ?

En disant cela je ne veux pas vous mettre en accusation, je veux réfléchir avec vous comment remédier à une situation qui rend impossible l’innovation démocratique de grande ampleur dont nous avons besoin. Car sans l’écho médiatique, les initiatives ne peuvent dépasser le stade de l’exploration. Nous sommes prisonniers d’un cercle vicieux : vous ne parlez que des sujets qui entrent dans le radar médiatique mais pour y entrer il faut dépasser une taille critique qu’on n’atteint que par la reprise médiatique ! Qu’ils soient 1 000, 10 000 ou 100 000, les projets « inframédiatiques » ne feront jamais la Une. Les tentatives des multiples collectifs pour faire converger les initiatives et augmenter leur visibilité ne sont que très peu efficaces.

Un journaliste, même un éditorialiste, doit – je suppose – être à la recherche de paroles différentes pour nourrir sa réflexion et éviter de tourner en rond en commentant les petites phrases.

Permettez donc à un citoyen qui ne se résout pas à cette « chronique d’une mort [de la démocratie] annoncée » de  vous proposer une chose simple : que nous nous rencontrions, comme vous le faites avec les acteurs du milieu politique, simplement pour « aller à la pêche » dans un vivier différent ! Pas avec moi seulement mais avec quelques « inventeurs démocratiques ». Je pense notamment à Pascal Aubert qui a une vue d’ensemble sur les démarches d’empowerment qui se développent en France (collectif pouvoir d’agir), à Armel Le Coz de Démocratie Ouverte qui propose de nouvelles formes d’interaction entre politiques et citoyens et rentre d’un tour de France, à Christophe Brossier qui patiemment collecte les initiatives notamment autour de l’usage du tirage au sort… Voyons-nous une fois par mois au cours d’un déjeuner et  échangeons sur ce que nous voyons émerger.

Je suis certain que vous aurez une moisson de billets ou d’éditoriaux fabuleuse ! … à intercaler avec la chronique de la vie politique telle qu’elle va car elle nous intéresse aussi même, parfois, pour l’analyse de telle ou telle « petite phrase » !

Pour conclure je pense que vous avez une responsabilité majeure pour que la prévision de Jean-Paul Delevoye, en réponse à Anne-Sophie Novel sur son blog, ne devienne pas réalité :

Ce système va imploser ou exploser par les forces citoyennes qui se rebellent de façon assez saine contre un système qui nous met dans le mur.

Il ajoutait :

Les citoyens doivent être des coproducteurs du futur. Mais le pouvoir a peur du pouvoir citoyen.

Messieurs les commentateurs, montrez que, vous, vous n’avez pas peur !!

 


vous avez peut-être reconnu dans le titre : Thomas Legrand, Jean-Michel Apathie, Laurent Joffrin, Christophe Barbier, Dominique Reynié et bien sûr… Alain Duhamel !

TGV du soir…

Ce billet ne comporte aucune réflexion nouvelle ! Il est plus perso que politique. A ne lire que si mes états d’âme et mes remerciements ont du sens pour vous. Sinon, rendez-vous au prochain billet… plus persopolitique

Je suis dans le train de retour de Paris, comme souvent…

J’ai hésité : lire un document sur mon téléphone pour préparer la réunion de demain (mais c’est bien petit un écran de tél, et le document est bien long…), sortir le roman qui m’accompagne (je le ferai sans doute tout à l’heure), mais pour le moment une impulsion subite me pousse à partager mon ressenti personnel avant deux événements importants pour l’« aventure démocratique » dans laquelle je me suis engagé. Ce blog, même écrit à la première personne, même mû souvent par des réactions à des lectures ou des faits d’actualité, reste (et restera !) un lieu de partage de réflexions. Pourtant ce soir, j’ai envie d’écrire sur un registre plus personnel.

Deux événements à quelques jours d’intervalle vont être fondateurs : le 11 avril, c’est la rencontre de lancement du Laboratoire de la Transition Démocratique ; le 15 avril, le point de départ de l’A 960 (le G1000 français). J’ai évoqué ces projets dans ce blog à plusieurs reprises. Ils sont sur le point de sortir des limbes.

Bien des doutes m’ont assailli ces dernières semaines au point de rendre mes nuits plus insomniaques que jamais ! La fatigue s’est accumulée, avec la nécessité de mener cette aventure prenante en parallèle du rôle exigeant et passionnant de « tête chercheuse » à Synergence que je tiens à assumer pleinement, … tout cela dans l’inconfort d’une situation fragilisée (revenus divisés par deux, inquiétude de mon entourage par rapport à des choix aventureux, …)

Je ne dis pas cela pour me faire plaindre puisque j’ai fait le choix de mener cette double vie professionnelle et engagée. Plutôt pour donner plus de valeur aux signes encourageants qui m’ont donné envie d’écrire ce soir, dans une forme de sérénité retrouvée !

Encourageant le fait qu’en quelques jours plus d’une dizaine d’inconnus aient pris la peine de soutenir publiquement le projet du Laboratoire en indiquant les raisons de leur engagement. Encourageant, le fait que près de cinquante personnes aient prévu de venir à la rencontre de lancement du Laboratoire alors que je pensais que nous ne serions à peine une petite trentaine. Encourageant, le fait que des personnes perdues de vue aient manifesté leur intérêt pour les aventures engagées en soulignant ma créativité et ma ténacité (ça fait du bien à l’ego qui avait plutôt tendance à l’autodénigrement ces temps-ci !).

Encourageantes enfin et surtout, toutes les rencontres de ces derniers mois, toutes les séances de brainstorming à Lyon, à Paris, à Forges-les-Eaux, dans des cafés, des bureaux, des casinos, en déambulant dans les rues ou la campagne, vautrés dans des canapés ou serrés dans des cafés bruyants ou même enfumés (vive les terrasses !), au cours de « conf calls » ou de séances de Skype, …

Ce soir, j’ai juste envie de dire merci. De rendre grâce (je sais c’est catho, mais que voulez-vous, je le suis !).

Si, nous sommes responsables ! …et nous pouvons agir

Voilà ce qu’a dit le Président de la République sur un ton qui n’admettait ni réplique ni contestation : « Ces crimes sont ceux « d’un monstre » et pas d’un fou qui serait irresponsable. Lui chercher la plus petite excuse serait une faute morale impardonnable. Mettre en cause la société, montrer du doigt la France, la politique, les institutions, c’est indigne ».  Je crains fort de tomber dans l’indignité selon Sarkozy mais, pour moi, le ton même du propos, sa violence, sa certitude aveugle à toute autre vision de la réalité sont indignes de la fonction qu’il occupe.
Alors notre société n’aurait aucune part à la dérive de ses membres les plus fragiles ? Mohamed Mehra serait donc un tueur-né, génétiquement programmé ? Toute la faute est sur lui et la société est blanche comme neige ? Absurde évidemment, comme serait absurde également l’idée d’incriminer la société et de blanchir le tueur.

Peut-on accepter de regarder dans cet « entre deux », ni tout blanc ni tout noir, où la personne humaine est bien responsable de ses actes et où la société doit néanmoins se poser des questions sur la manière dont elle laisse dériver certains de ses membres ?
Arrêtons de confondre culpabilité et responsabilité : il y a bien un coupable identifié mais aussi des responsabilités multiples quant au contexte qui permet l’émergence de tels faits.

Peut-on rappeler une vérité d’évidence mais trop occultée car dérangeante ? Comme pour toute relation, l’intégration suppose deux interlocuteurs, celui qui s’intègre et ceux qui l’accueillent. Depuis des années nous nous focalisons sur ceux qui doivent s’intégrer mais que faisons-nous pour nous rendre plus accueillants ? A quoi peut bien servir un parcours universitaire brillant si la suite est constituée de petits boulots mal payés, précaires et sans rapports avec la formation suivie ? Comment donner envie aux jeunes de suivre l’exemple de ceux qui font l’effort de se former malgré des conditions d’études difficiles s’ils voient les galères que les diplômes n’évitent pas ?

Lors de la crise des banlieues de 2005, nous avions déjà écrit en ce sens. Peut-être que les entreprises que nous interpellions aux Ateliers de la Citoyenneté sont aujourd’hui plus prêtes à s’engager sur ces sujets . Les efforts faits en matière de RSE ou de Développement Durable sont plutôt encourageants. Relançons la bouteille à la mer … !

Des salariés d’entreprise dans les carnets d’adresse des jeunes des banlieues ?
On sait que ce qui permet de trouver un emploi, c’est bien sûr les compétences sanctionnées par des diplômes, mais c’est aussi le capital relationnel des personnes. Or chacun convient qu’un jeune habitant en banlieue dispose d’un capital relationnel très réduit. Ses interlocuteurs adultes sont essentiellement des professionnels du travail social qu’il ne rencontre que dans une posture d’aide ou d’assistance.

Ne pourrait-on pas envisager un vaste programme de volontariat ouvert à des salariés d’entreprises pour qu’ils puissent participer AVEC des jeunes habitant les banlieues à des programmes d’intérêt général de tous ordres ? Dans le cadre des activités proposées, des relations se noueraient avec des adultes socialement intégrés, qui pourraient faire bénéficier les jeunes de leur carnet d’adresse. On ne serait pas là dans une logique d’aide directe mais dans le registre de ce que les Québécois appellent le « mentorat », une relation choisie née d’une rencontre à l’occasion d’une activité faite ensemble. Puisque ces rencontres ne se font pas spontanément, il faut les susciter. On pourrait s’appuyer sur des initiatives réussies de brassage social comme la préparation du défilé de la Biennale de la Danse à Lyon. Ce qu’il faut, c’est rendre ce programme attractif, en y impliquant des personnalités charismatiques, en le médiatisant  mais aussi, tout simplement, en l’appuyant sur des activités créatives et valorisantes.
Les entreprises qui participeraient à un tel programme en libérant leurs salariés quelques heures par mois en mécénat de compétence, seraient doublement gagnantes : elles permettraient à leurs salariés de s’investir dans une aventure humaine dont bien des enseignements pourraient être réinvestis dans l’entreprise, elles bénéficieraient de contacts préalables entre des jeunes et des salariés facilitant ensuite les recrutements et surtout l’intégration professionnelle.

Qu’on me comprenne bien : je ne prétends pas que l’on évitera des crimes comme celui de Mohamed Mehra par un programme de volontariat, même d’ampleur nationale… Pour autant il y a bien une chose dont je suis sûr : il ne faut pas laisser s’enfler la double vague de rejet d’un côté et de rage d’être rejeté de l’autre. Essayons chacun d’y contribuer, loin des dénonciations en indignité.

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