Succès

Triomphe, raz-de-marée, voilà les mots qui décrivent aujourd’hui les succès en cours d’un président qui se veut « jupitérien ». Je ne jugerai pas ici de leur bien-fondé. Juste un éclairage sur le mot succès.

Un mot sans ambiguïté apparente, chacun étant en mesure de distinguer un succès d’un échec. Bien sûr nous avons en tête ce que dit l’adage : il n’y a pas loin du Capitole à la roche Tarpéienne (les Romains ayant eu l’idée perverse de précipiter les condamnés du haut de la colline où étaient également accueillis les triomphateurs). Qu’un succès ne soit pas définitif et qu’il puisse être suivi de déconvenues, on peut l’ignorer dans l’euphorie des victoires mais on ne l’oublie jamais vraiment. L’ambiguïté que je veux pointer est ailleurs, elle tient à l’étymologie du mot : sub cedere. Succéder, le verbe, ne parler pas de bonne fortune, il indique seulement un mouvement : aller après. Succéder à son père ne garantit pas le succès, simplement la succession. Je trouve intéressant de voir le succès comme un mouvement plutôt que comme un aboutissement. Le mouvement suppose le déséquilibre et donc l’incertitude. Le succès est donc une progression pas un résultat. Dans un monde qui veut tout évaluer précisément à tout instant, je trouve intéressant que de la relativité s’installe dans le succès ! Le succès scolaire quand on était enfant se résumait souvent à un lapidaire « en progrès », c’était frustrant mais tellement juste en fait…

Tsimtsoum

Une parenthèse pour parler d’autre chose que de politique à la veille de l’échéance présidentielle… ou pour y revenir autrement !

Résultat de recherche d'images pour "tsimtsoum"Un mot qui ressemble à un éternuement. Ou à une onomatopée à la Tagada Tsouin Tsouin. Et pourtant ! Tsimtsoum est un mot hébreux on ne peut plus sérieux. On le trouve dans la Kabbale pour désigner le mouvement de retrait de Dieu pour laisser advenir la Création. Si Dieu, Tout puissant par nature, ne s’autolimite pas, alors il n’y a de place pour rien d’autre. Donc pas de Création. Cette notion découverte dans le Complexe d’Elie (voir ce billet) m’a semblée intéressante au moment où je travaillais pour une multinationale très sûre de sa puissance. Si le Dieu de la Bible voit l’utilité de limiter sa puissance, il serait bon que nos entreprises le découvrent aussi ! Surtout lorsqu’elles parlent de développement durable. Il ne s’agit pas en effet pour l’entreprise d’apporter une simple contribution à la vie locale ou de renforcer l’acceptabilité de son activité : dans les deux cas la puissance reste inchangée. Même rendre des comptes n’est pas la question première, l’essentiel est d’accepter une incomplétude fondamentale qui pousse à la création. Ce qui est dit là pour l’entreprise vaut aussi pour un Président de la République nouvellement élu et un peu trop sûr de son destin !Toute autosuffisance supposée tient de la suffisance tout court. En économie comme en politique. La religion le sait depuis longtemps (hélas pas les fanatiques).

 

Ipséité

Un mot de philosophie, et aussi de politique, …forcément !

Lucien_JerphagonPeu familier de la philosophie, je découvre ce mot d’ipséité dans un entretien où Lucien Jerphagnon l’utilisait, à la suite de Jankélévitch ou de Ricœur. Pour ce dernier, le mot sert à sortir de la quête impossible de l’identité : « Le dilemme disparaît si, à l’identité comprise au sens d’un même (idem), on substitue l’identité comprise au sens d’un soi-même (ipse); la différence entre idem et ipse n’est autre que la différence entre une identité substantielle ou formelle et l’identité narrative ». L’ipséité c’est la conscience de soi, mais d’un soi qui vit et se transforme. Ce que rajoute Jerphagnon, c’est son caractère banal. Chaque ipséité en vaut une autre et rien n’est plus banal que la recherche de la singularité. Je trouve cette pensée réjouissante à l’heure où certains s’imaginent en « hommes providentiels ». Et si nous voyions la part providentielle qui existe en chaque homme ? Une banalité par le haut en quelque sorte, loin de la plate normalité qu’on nous promettait naguère. Sachons nous raconter dans toute notre complexité et arrêtons de vouloir dire ce que nous sommes. Nous ne « sommes » pas, nous « devenons ». L’identité est carcérale et pathologique, l’ipséité est une composition toujours en cours. En politique, nous avons besoin de la potentialité de l’ipséité plutôt que des fausses certitudes de ceux qui se pensent d’un bloc. Ni normalité lénifiante, ni exceptionnalité présomptueuse. Simplement des personnes qui acceptent d’être en chemin. Elles seront plus entraînantes que toutes les figures d’autorité immarcescibles.

A noter : j’interviens ce samedi 4 mars à 16h au Salon Primevère sur le thème  « vers une société démocratique » – Lyon Eurexpo

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