Platane

Que vient faire le platane dans un blog sur notre rapport à la démocratie ? Une récréation botanique ? Plutôt une re-création belle et tonique !

Sur nos avenues, nous n’en avons que la version mutilée aux moignons difformes mais, non taillé, c’est un arbre à l’ombre généreuse. Je viens de découvrir que ce sont les grecs qui ont donné son nom à cet arbre venu d’Asie qu’ils avaient adopté pour rafraîchir les places où ils se réunissaient. Et le plus beau, c’est que place et platane ont la même racine hellénistique signifiant large, étendu. Joëlle Zask[1], la philosophe à qui je dois cette découverte démontre magnifiquement que c’est cette « place au platane » qui constitue la véritable place démocratique, loin de l’idéale agora ou de la démonstrative place de la République. C’est la place qui permet la vie collective, l’initiative et la rencontre parce qu’elle est ouverte, irrégulière, accueillante aux activités les plus banales mais aussi aux discussions sans fin à l’ombre des platanes. Nous nous sommes trop habitués à ne voir la démocratie que dans sa forme solennelle et mathématique, le platane et la place qui se déploie alentour convoquent un imaginaire démocratique moins abstrait, plus attentif au commun, au bien vivre et à la concorde. En parlant de concorde, quelques platanes seraient les bienvenus sur l’esplanade inhospitalière de la place de la Concorde qui, en l’état, porte si mal son nom !

[1] Joëlle Zask, Quand la place devient publique, éditions Le Bord de l’eau, 2018

Au-delà des mâles blancs

Deux « mâles blancs » se sont donc échangé un rapport. Et après ? Après plus rien disent beaucoup d’élus locaux et de commentateurs politiques. Et si on regardait de plus près ? L’enjeu est trop important pour en rester aux blessures narcissiques, même injustes

Bien sûr, il faut y revenir. Mais comment ? J’ai essayé plusieurs angles : la question des « mâles blancs » et cette délégitimation de la possibilité d’agir si on n’est pas soi-même directement concerné (et donc, si on comprend bien, non-blanc et non-mâle) ; le ton employé par le président qui donne à ses interlocuteurs le sentiment qu’ils sont incompétents et que seule son approche à lui est la bonne, ramenant toute autre méthode à un archaïsme (avant sa naissance) ; les contradictions du président qui demande un plan et le récuse dès qu’il le reçoit mais en reprenant sa philosophie de co-construction et de mobilisation de la société civile tout en niant qu’elle soit présente dans le rapport.

Délégitimation, mépris, confusion, beaucoup de colères se sont exprimées sur ces trois aspects de l’intervention présidentielle… et j’avoue que je ne suis pas loin de les partager. Mais alors on tombe vite dans l’affrontement stérile et on se met soi-même à caricaturer… ce qu’on reproche justement au président d’avoir fait. Il me semble important de ne pas entrer dans la spirale de délégitimation qui ne produira que de la rancœur et une incapacité à agir ensemble alors que la clé reste bien dans cette capacité à réunir une Nation autour des problèmes qu’elle a à résoudre.

J’ai donc voulu, malgré ma déception, revenir au texte même de l’intervention présidentielle, telle qu’elle a été retranscrite sur le site de l’Elysée. Apparemment improvisé sur la base de notes, il tourne néanmoins autour de 3 axes : une politique des droits réels, une politique d’émancipation par l’école et la réussite économique, une politique pour « faire République ». Même si le discours reste brouillon, même si ce n’est pas ce que j’aurais espéré en termes de moyens, même si je trouve Borloo très optimiste quand il dit que tout a été coché, force est de constater qu’il y a bien une philosophie de l’action qui est affirmée et qui va au-delà d’un simple appel à l’émancipation individuelle auquel certains veulent réduire le propos présidentiel et que la mobilisation de la société civile n’est pas conçue comme une simple défausse de l’Etat.

Déconstruisons pas à pas les principaux sujets d’exaspération et de critique, en tentant de dépasser les désastreuses premières impressions. Continuer la lecture de « Au-delà des mâles blancs »

Hypotypose

Ce mot, rendu un peu balourd par sa consonance avec hippopotame, est pourtant une figure de style majeure, au plus près de la question de l’imaginaire qui sert aujourd’hui de fil conducteur à mes projets…

L’hypotypose est une description qui a pour but de saisir son lecteur par un effet d’évidence. On est plongé dans la réalité décrite sans plus aucune distance narrative. L’auteur disparaît. On ne lit plus : on vit, on éprouve !

Racine est souvent cité pour avoir produit les plus belles hypotyposes et c’est naturellement dans sa biographie, romancée par Nathalie Azoulai – Titus n’aimait pas Bérénice – que j’ai découvert le mot. Avec une nouvelle occurrence quelques jours plus tard dans un documentaire consacré à Macron à propos de son discours à l’enterrement de Johnny Halliday !

Le mot me poursuit, j’en cherche donc l’actualité dans une époque où l’image triomphe. Ce n’est sans doute pas un hasard si notre temps, où tout est montré sans filtre, est à ce point en panne d’un imaginaire permettant de se figurer l’avenir… Tout voir nous sature d’images et nous empêche de voir au-delà de l’immédiatement accessible. La force du récit écrit ou oral c’est qu’il nous pousse à voir, sans rien sous les yeux. A l’heure des capteurs d’images rendus omniprésents par nos portables, il est sans doute temps de retrouver la force incroyable des hypotyposes pour réactiver nos imaginaires. Vive les mots!

 

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